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Photo du rédacteurJuan Carlos León-Aguirre

Comment opposer à l’administration ses propres prises de position ?



Loyauté administration fiscale

1.- On sait qu’en vertu des articles L. 80 A et L. 80 B du LPF, le contribuable est en droit d’opposer à l’administration fiscale les prises de position formelles exprimées par cette dernière quant à l’application d’un texte fiscal à une situation de fait en particulier.


Un contribuable qui fait l’objet d’une procédure de rectification, par exemple, est en droit d’exiger que son éligibilité à tel ou tel régime d’imposition en particulier ne soit pas remise en cause, compte tenu de la prise de position formelle que l’administration a pu adopter en ce sens, avant la survenance du litige.


Se pose alors la question de savoir quelle est la marche à suivre pour le contribuable qui entend opposer à l’administration ses propres prises de position.



2.- À ce propos, le Conseil d’État a notamment admis, par une décision M. Moussali, la possibilité pour le contribuable d’invoquer implicitement la garantie des articles L. 80 A et L. 80 B.


Dans cette affaire, le contribuable avait invoqué, à l’appui de sa demande en décharge, une lettre par laquelle le ministre du budget avait apporté des précisions à l’ambassadeur du Liban à propos du régime fiscal applicable aux ressortissants libanais réfugiés en France.


Saisi de l’affaire, le Conseil d’État a considéré que l’intéressé «devait être regardé comme ayant, implicitement, mais nécessairement, demandé à bénéficier ... sur le fondement de l'article L. 80 A du LPF», alors même que ces dispositions n’avaient pas été expressément invoquées par les parties.


Cette approche pouvait s’avérer particulièrement utile pour les contribuables qui, faute d’avoir été assistés par un conseil devant les premiers juges, auraient omis d’invoquer en bonne et due forme les articles L. 80 A et L. 80 B du LPF, dans l'objectif d’opposer aux services fiscaux ses propres prises de position.



2.- Une décision de non-admission du 10 juin 2021 permet cependant de douter de la pérennité de cette jurisprudence.


Dans une configuration tout à fait similaire à celle de l’affaire M. Moussali, le Conseil d’État a en effet refusé d’admettre le caractère sérieux d’un moyen tiré de l’invocation implicite de la garantie prévue aux articles L. 80 A et B du LPF par un contribuable qui, sans avoir expressément invoqué ces dispositions devant les juges du fond, avait néanmoins exprimé sa volonté d’opposer aux services fiscaux ses propres prises de position quant à sa situation fiscale personnelle (CE (na), 10 juin 2021, n°448131, Époux C., concl. L. Cytermann.- Pourvoi dirigé à l’encontre d’un arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille du 27 octobre 2020).


Pour justifier cette solution, le rapporteur public Laurent Cytermann a plaidé en défaveur du maintien de la jurisprudence M. Moussali, en se prévalant pour l’essentiel du caractère dérogatoire des articles L. 80 A et B du LPF.



3.- Même si la portée des décisions de non-admission - de plus en plus nombreuses soit dit en passant - est toujours difficile à apprécier, il paraît néanmoins qu'aujourd'hui, la possibilité pour les contribuables d’opposer à l’administration ses propres prises de position a vocation à être strictement encadrée.


La décision du 10 juin 2021 s’inscrit en effet dans le cadre d’un courant jurisprudentiel plus large qui est nettement en ce sens.


À titre d’exemple, on rappellera ainsi qu’en vertu de la jurisprudence Sté Mercedes, il est jugé que, lorsque le contribuable invoque au soutien de son interprétation d'un texte une instruction commentant ce texte, il ne peut être regardé comme ayant demandé le bénéfice de la garantie prévue par l'article L 80 A du LPF.


Les contribuables qui, dans le cadre d’un litige avec l’administration fiscale, souhaitent opposer à cette dernière ses propres prises de position ont donc intérêt, plus que jamais, à se faire assister par un conseil avisé.

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